david-fincher-travelzik

LE ROCK INDUSTRIEL / DAVID FINCHER

02 10

C’est la rentrée, il est temps de ressortir son baladeur MP3 rayé pour le trajet inferno express, direction le lycée. Et quoi de mieux que du rock industriel malsain pour se mettre dans l’ambiance de la semaine.

Aujourd’hui, on parle angoisse, musique dérangée, tueurs en séries et cinéma. Travelzik, la seule web-radio qui vous assure un voyage en enfer. Gratuitement.

 

*pour pouvoir visionner la plupart des clips présentés dans cette chronique, la plateforme vous demandera d’être majeur, mais bon, c’est comme pour le porno hein*

 

L’INDUS ? COMME LES CIGARETTES ?

Un brin d’histoire. Dans la fin des années 1970 au Royaume Uni émergent deux mouvements musicaux majeurs : la musique industrielle et le punk-rock. Issus d’une contre-culture dénonçant l’essor de la société industrielle, ces deux genres vont se rejoindre dans l’utilisation de sonorités brutes et grinçantes, dépeignant une atmosphère morbide de la réalité.

Pour la musique industrielle, on peut citer Throbbing Gristle comme précurseur, notamment lors de leur passage avec le COUM Transmissions, un collectif d’artistes controversé pour ses représentations, traitant de thèmes comme le totalitarisme, la pornographie ou les tueurs en série.

Ce n’est pas pour les âmes sensibles, c’est trash, comme diraient les jeunes qui ont vieilli. Mais c’est représentatif des origines du mouvement : l’objectif est de choquer, tant à travers les thèmes abordés, que dans le décor musical, sombre et effrayant.

Pour ce qui est du punk-rock, ce n’est pas vraiment le sujet de la chronique, et le genre étant plus universellement connu et médiatisé, il ne semble pas nécessaire de s’attarder sur le mouvement. On notera tout de même des thèmes similaires, autrement dit une volonté de casser les codes, de revendiquer une vision de la société, de scander no future, comme si l’avenir de notre société était condamné, ainsi que l’utilisation des sonorités grinçantes, agressives, choquantes.

L’INDUSTRIAL-ROCK DES NINETIES

L’explosion du genre de l’industrial-rock a lieu dans années 1990, avec un certain nombre de groupes phares. Il s’agit, entres autres, de Marylin Manson, dont le nom est en partie emprunté au sinistre gourou Charles Manson, responsable de multiples meurtres dans les années 60 aux Etats Unis – dont celui de Sharon Tate, épouse de Roman Polanski – , de Rammstein, la figure allemande fascinée par la pyromancie, de Rob Zombie, musicien et réalisateur de l’horreur, et bien sûr, du groupe qui sera le lien vers la prochaine partie, Nine Inch Nails.

Pour Marylin Manson, non, l’histoire selon laquelle il se serait fait retiré des côtes afin de pratiquer l’auto-fellation n’est qu’une légende urbaine. Cependant, l’artiste s’inscrit bien dans les thèmes de la musique industrielle des seventies. Il suffit pour cela de visionner ses clips, toujours très léchés, extrêmement travaillés dans leur ambiance, de vraies pépites de court-métrage.

La mort et le sexe. Une vision critique et décomplexée de l’Amérique Moderne et de ces caricatures de fêtes lycéennes, où là encore, l’objectif est de choquer par un décor sombre et très nettement provocateur. Mais Marylin Manson, c’est également l’horreur, la déformation, la monstruosité.

On ne présente plus la machine allemande qu’est Rammstein, encore aujourd’hui en activité, leur dernier album datant de cette année 2019. Bien qu’on s’éloigne de l’industrial-rock dans les sonorités, qui tirent chez Rammstein vers le métal, l’intention est bien la même, et le groupe s’est fait une place parmi les légendes de ce genre.

Quant aux thèmes, pas de surprise, on retrouve bien évidemment les faits divers glauques, le sexe et la mort au menu, comme en témoigne le titre Mein Teil :

Anecdote assez connue, puisqu’elle a fait du bruit à la sortie de ce single, ce morceau est en réalité inspiré d’un fait divers de 2001. Un homme passe une petite annonce sur internet : cherche jeune homme bien proportionné pour le manger. Intérêt pour le cannibalisme et la tuerie demandé. La suite est telle qu’on peut l’imaginer, une victime sera tuée, découpée et mangée. On reste dans les thématiques.

A noter que Rammstein se montre tout de même plus divers dans les thèmes abordés, notamment dans le dernier album : le clip de Auslander, vive critique de la colonisation africaine, en est un exemple.

Rob Zombie est peut être un peu plus atypique, mais doit tout de même être mentionné. Le personnage de Rob Zombie, de son vrai nom Robert Bartleh Cummings, est dément dans tous les sens du terme.

Avec lui, c’est les enfers, les vampires, l’hérésie et les démons qui sont au programme. Le personnage qu’il s’est crée mise tout sur cette image démoniaque : les sonorités sont brutales, métal, à la manière d’un Rammstein, tout en étant plus groovy grâce à des rythmique plus sautillantes et des mélodies entrainantes – pour peu qu’on puisse trouver de l’industrial-rock sautillant.

Au niveau des thèmes, on a Teenage Nosferatu Pussy, Pussy Liquor, Dragula ou encore House of 1000 Corpses.

On ne s’éloigne donc pas tant que ça de l’industrial-rock/métal : la mort, le sexe, tout en rajoutant chez Rob Zombie cette touche démoniaque, paradoxalement plus dansante que dans les deux derniers groupe cités.

Pour rajouter à la démence du type, noter qu’il est également réalisateur pour le cinéma, non pas dans le genre des comédies romantiques, comme on pourrait le croire, mais dans celui de l’horreur, bien évidemment. Un clip et une bande-annonce, pour un aperçu du génie du type.

Le clip de Dragula sur l’album Hellbilly Deluxe :

La bande-annonce de Werewolf Women of the SS (fausse bande-annonce diffusée lors de la soirée Grindhouse, entre Planet Terror de Robert Rodriguez et Death Proof de Quentin Tarantino):

Enfin, Nine Inch Nails, abrégé NIN, va faire figure de proue du l’industrial-rock. On est ici confronté à un groupe qui va parfaitement intégrer la musique électronique à un rock violent, tout en exploitant au maximum les thèmes des débuts, autrement dit, la mort, le glauque, les tueurs en série, la pornographie.

Nul besoin de s’éparpiller, un album suffit : The Downward Spiral. C’est ici la quintessence même de l’industrial-rock. Charles Manson, gourou responsable de plusieurs meurtres sanglants, a été mentionné plus haut. Pour l’anecdote, il faut savoir qu’au moment de la composition de The Downward Spiral, le chanteur du groupe, Trent Reznor, habitait dans la maison où s’est produit le meurtre de Sharon Tate, cette même maison où le mot pig – porc en français – était écrit sur les murs avec le sang des victimes. Le second morceau de l’album est titré Piggy.

L’ambiance produite par la musique de Nine Inch Nails est grinçante, suante d’angoisse, teintée des thèmes déjà abordés dans les autres groupes, mais nettement renforcés par une utilisation plus importante de la musique électronique, permettant des nappes expérimentales, des sonorités étranges, là où Rammstein, Rob Zombie et Marylin Manson utilisent la violence du métal, se rapprochant d’une certaine manière du punk des origines.

Le clip de Closer :

On notera que les groupes d’industrial-rock font toujours particulièrement attention à la qualité de leurs clips, comme s’il s’agissait de courts métrages hautement cinématographiques.

 

ETEIGNEZ LA MUSIQUE COMMENCEZ LE CINEMA

 

Rob Zombie a déjà été évoqué en tant que réalisateur, mais NIN a également un lien très fort avec le cinéma, notamment grâce au chanteur du groupe, Trent Reznor. Il se trouve que ce dernier collabore régulièrement avec un réalisateur lui aussi intéressé par les thèmes de l’industrial- rock, et plus notamment les tueurs en série. Trent Reznor et Atticus Ross composent ainsi les bandes originales de The Social Network, Millenium et Gone Girl, trois films signés David Fincher.

David Fincher, c’est également le réalisateur de l’excellent Zodiac, fresque retraçant les enquêtes simultanées de la police et des journalistes sur le tueur californien des années 1960/1970, mais également de Se7en, encore à ce jour un des meilleurs thrillers de tous les temps, magistralement orchestré et dirigé – Brad Pitt, Morgan Freeman et Kevin Spacey y sont pour beaucoup.

Ce générique, d’une précision absolue, comme c’est toujours le cas avec Fincher, rassemble de nombreux éléments propres à l’industrial-rock, et pour cause, la musique en fond est une version modifiée de Closer de NIN, bien avant la collaboration entre Reznor et Fincher.

Parce que c’est bientôt Halloween, et que donc, c’est cool, une petite série de liens bonus qui peuvent être intéressants.

Trent Reznor a monté un projet musical avec sa femme, détaché de NIN, mais qui utilise parfaitement la musique électronique industrielle : How To Destroy Angels. Le résultat est très convaincant, beaucoup moins violent que NIN, peut être une entrée en matière plus douce.

David Fincher est également le producteur – et réalisateur pour certains épisodes – de Mindhunter, dont la deuxième saison est sortie cet été 2019. La série nous fait suivre deux agents du FBI dont la mission est de mettre au point ce que l’on appelle aujourd’hui la psychologie criminelle, ou profiling, grâce à des entretiens de tueurs en séries – ceux de Kemper et Charles Manson sont des scènes particulièrement prenantes.

Enfin, un court live impliquant Dave GrohlNirvana, Foo Fighters, Joshua HommeQueens of the Stone Age, et Trent ReznorNIN.